"GARONNE IN ABSENTIA"
Paru le 7 octobre 2021
La Garonne, c’est un monde, quasiment une mer, et quand bien même ne le serait-elle pas tout à fait, il y roule toujours une femme. "Garonne in absentia" en est le roman. Au premier abord, le livre se présente comme celui d’un couple qui décide d’abriter sa passion le plus possible à l’écart de la société et de son commerce. Le domaine de Labrune, une folie Second Empire aux fondations bien plus anciennes, est à l’abandon quand Jean et Mathilde l’acquièrent. Riches de leur enthousiasme, ils se chargent de la retape. Pendant quelques années, le sauvetage de la propriété s’effectue dans l’euphorie. Mais le quotidien, d’abord imperceptiblement, puis avec une irrépressible violence, enferme chacun dans son angoisse et sa névrose. Le récit souligne comment la guerre des sexes vouant ses protagonistes à la démence est tributaire de l’Histoire : sous le poids du passé et la menace d’un gigantesque tulipier de Virginie, le couple se défait. Et à de premiers silences succèdent une croissante incompréhension. Puis, « ensemble séparés » dans la besogne professionnelle et les obsessions qui les habitent, ils se retranchent chacun dans une bulle, l’un s’épuisant à donner corps à une utopie, l’autre s’enfonçant dans la dépression et la neurasthénie. La barque de l’amour se brise contre la vie courante… Ce faisant, au fil des pages, "Garonne in absentia" installe le fleuve en majesté : changeant de couleurs au fil de la journée et des courants, dans ses limons il charrie la matière dans laquelle sont pétris les rêves et les tragédies qui emportent et submergent toujours les hommes. Creusant et remodelant sans cesse un lit et des rives qu’une plante invasive, la renouée du Japon, colonise, il est comme le Congo et d’autres rivières africaines l’image même du temps et de l’arasement qu’il suppose. Cette Garonne indomptée, puissante, sauvage qu’à part de rares exceptions les écrivains ont négligé de décrire et de chanter trouve ici son poème.
Bordeaux, librairie "La Mauvaise Réputation" (rue des Argentiers),
vendredi 22 octobre, à partir de 18h00 :
Présentation-signature dédicace.
Sur la radio "La Clé des ondes" :
https://www.youtube.com/watch?v=E9jw-sUij8s
Jean-Paul Gavard-Perret, sur le Salon-litteraire :
L'analyse de l'écrivain Philippe Couillaud (auteur de "L'Envers du voyage" et de "Une pluie grise et fine") :
"Un homme et une femme espèrent trouver fondation de leur amour dans une sorte de manoir du dix-neuvième siècle dont certains soubassements remonteraient au dix-septième. Les attraits des pierres en ruine ne font pas forcément bon ménage avec ceux de l'amour. Là où charpente et ciment consolident l'ossature d'un bâtiment le désir peut se diluer. Le temps écoule ses saisons et la relation fait eau de toutes parts. Mathilde et Jean, baignés de culture et d'intelligence, négligent leur substrat et affouillent plus qu'ils n'abordent une plage de sables mouvants dont ils ne peuvent s'éloigner tels des papillons de nuit attirés par la lumière brûlante et aveuglante.
Tout près, toujours présente, la Garonne, ses marées, sa faune qui embaume nos assiettes, son mascaret, ses troncs d'arbre à la dérive et parfois ses corps disloqués qui ont choisi son lit comme linceul, la Garonne coule des jours tranquilles, embellie par l'écriture de l'auteur.
Et puis il y a les autres. Un couple improbable de Roumains rencontrés par hasard, témoins impuissants du désastre en cours. Hypothèse : les autres, tous les autres, auraient-ils manqué à Mathilde et Jean au point de ne les faire que se retourner sur eux-mêmes ? Davantage envisageable pour Jean que pour Mathilde que la profession place immanquablement face à l'autre mais dans la dimension curative. Dans « Une fille d'Alger » aussi bien que dans « Mémoires des pierres » et davantage encore dans « Scènes de la vie sociale » les autres font présence forte, traînant avec eux le charivari de l'Histoire.
Mathilde et Jean en se retirant à Labrune se seraient-ils trop éloignés des autres ?
Inutile de tenter de répondre. L'auteur, à l'image de la Garonne s'en remet au flux et au reflux. L'auteur, justement, apparaît de temps en temps au détour d'une phrase et s'invite très discrètement, à la fête littéraire. Ce livre est une fête de l'écriture."
Georges Sebbag sur le site de "Mélusine" :
https://melusine-surrealisme.fr/wp/manoir-folie-et-chateau-par-georges-sebbag/
Jean-Paul Gavard-Perret sur le site de "Le Litteraire" :
http://www.lelitteraire.com/?p=76084#more-76084
Entretien avec Vincent Taconnet pour "Espaces Marx 33 Aquitaine" :
https://www.youtube.com/watch?v=xUw6zZv_png
"Le Processus de la création et le pouvoir des mots", Entretien accordé à Noureddine Mhakkak, pour "El-Bayane" (Maroc) :
https://albayane.press.ma/le-processus-de-la-creation-et-le-pouvoir-des-mots.html
"Bordeaux est mon poste de vigie", entretien recueilli par Velimir Mladenovic, in "Quinzaine(s)", n°1240, novembre 2021, p. 12.
Christiane Chaulet-Achour, "Jean campait dans son mirage", dans "Diacritik" :
Théo Ananissoh, in "La Cause littéraire" :
Les impressions de lecture de l'écrivaine Noëlle Fargier :
« Je ferme "Garonne in absentia". Elle va errer quelques jours voire plus sur la table du salon avant sa place définitive, classée par ordre alphabétique. Les portes du château restent entrouvertes, les sphinx somnolent. Jean ivre de spleen, Mathilde sensuelle, Madame poussières d’étoiles, Anton bacab du désordre et Labrune tantôt embrumée de Garonne, tantôt irisée du Tulipier… Les fauves témoins du temps, de l’espace. Encre vagabonde. De la Gironde à l’Afrique jusqu’à l’Albanie, de couleurs en noirceurs. De vie, de mort à l’immortalité. Je suis à Figueras, invitée chez Dali. Une femme regard froid, lèvres pulpeuses. Nul doute, elle est là. Œil trompeur ou trompé ? Non. Simplement une autre approche. "Garonne in absentia" défie par ses perspectives, ses divagations, son errance, son statisme. Corps et esprits. Universellement. "Garonne in absentia" à l’instar du corps humain par son anatomie, ses appareils multiples, sa physiologie, palpe la perfection avant la panne et le point mort. Jouissance-Ascèse. Serait-ce les 100 yeux de Panoptès au plumage mordoré qui aurait insufflé ces mots riches, chahutant le lecteur de ses hétéroclites intuitions, émotions, ou discernements ? ‘… la création rééquilibre l’arc des émotions et la morbidité de ceux dont l’existence n’en serait pas une sans cet investissement socialement superfétatoire…’ »
Intervention à l'émission "Tambour battant" d'Antoine Spire (17 décembre 2021) :