Je suis sur le point d’ouvrir le chantier de mon prochain roman. Je me corrige : à vrai dire, il est déjà ouvert, au fil des mois, malgré le labeur académique à flux tendu dont je m’acquitte j’ai pu amasser de la documentation, prendre des notes, lisser le plan détaillé de l’ouvrage qu’à ce stade je songe de titrer : Là-bas l'enfer au milieu des eaux. C’est en août dernier, alors que j’avais signé le bon à tirer de Garonne in absentia, que la trame de ce livre m’est venue, avec le désir violent d’en situer l’intrigue dans le Médoc, au cœur d’un domaine viticole qui existe bel et bien mais que je vais remodeler en fonction de mon imaginaire et des obsédantes images mentales avec lesquelles je vis ou qui me travaillent sans que je ne m’en aperçoive toujours, et en l’espèce par besoin de me purger d’une énigme affreuse que je ne parviendrai jamais à percer, mais qui exige et me demande de prendre mes distances avec elle en la mettant salutairement en fiction. Cette entreprise nécessitait que je trouve un lieu à hanter, pour y loger certains de mes rêves et aussi pour l’y délester du poison avec lequel l’existence m’a mithridatisé, il me fallait un solide point d’ancrage, celles et ceux qui me lisent savent que tous mes textes bien que tangents à la réalité s’arriment solidement à elle, je le voulais en résonance avec ceux qui m’ont permis de coucher dans la langue Bordeaux la mémoire des pierres (2015), Une fille d’Alger (2018) et ma tropicale Garonne in absentia (2021). Cet endroit, je le connaissais un peu. Sa pensée a mûri. Elle a lentement cheminé jusqu’à ce que j’en vienne à demander au propriétaire s’il m’autorisait à m’« emparer » littérairement de sa demeure et de ses vignes, à me les approprier, afin d’en faire le théâtre d’une très sombre destinée. Et comme il a accepté, il a libéré le dernier frein qui me retenait pour me lancer à la rencontre de Véronique et de Maurice, les deux protagonistes de ce récit dont je suis enceint depuis presque une année. J’en ai parlé à mes proches, à plusieurs connaissances et relations récemment croisées, interrogeant l’un questionnant l’autre sur tel ou tel aspect auquel je me confronterai lors de la rédaction, ainsi par exemple encore hier au soir ai-je sollicité les lumières de ce médecin qui déjà pour Garonne m’a si obligeamment et si judicieusement éclairé. Et puis je me suis organisé pour installer mes quartiers, dès la semaine prochaine, à compter du 13 mai, au Domaine de Barrouille. J’en aurai les clés, j’y séjournerai seul, jusqu’au 20. Toute une semaine. Bien décidé à contraindre le génie du coin à sortir de son repaire, dans le but de l’apprivoiser et de le grimer à mes couleurs de mélancolie.
J’en suis d’autant plus impatient que ce mercredi j’ai essuyé comme une injonction du réel lequel a diligenté non pas le facteur mais le notaire, dont j’ignore s’il a une escarbille dans l’œil ou si jeune comme moi il s’est pâmé en reluquant sur l’écran d’une salle plongée dans le noir les boucles blondes de Jessica : quoi qu’il en soit, en sonnant deux fois à sept ans d’intervalle il m’a signifié l’urgence de donner forme à ce cauchemar.
Comme par le passé, je tiendrai celles et ceux qui suivent mon travail romanesque informés de l’état avancement du manuscrit.
Voilà pourquoi j’ai ménagé sur ce site un nouvel onglet : « Le Chantier de mon nouveau roman ». J’y téléchargerai des photographies de courtes observations des remarques. En espérant que cela vous incite à m’accompagner dans cette création. Pour y accéder, il vous suffira de cliquer sur ce lien :
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